Le liège & le chêne liège
Le chêne-liège (Quercus Suber) est un arbre unique en son genre car son écorce, le liège se régénère une fois extraite. Cette délicate opération d’écorçage, confiée à des spécialistes, sera répétée tous les 9 ans, période durant laquelle les arbres ne seront jamais coupés ni endommagés.

Les solutions apportées par l'ensemble des acteurs de la Filière Liège pour lutter contre le TCA

La filière liège, consciente depuis de nombreuses années de la nécessité de se débarrasser de ces molécules indésirables a lourdement investi à la fois en travaux de compréhension des origines du phénomène et en recherche de solutions tant préventives que curatives.

Ces travaux se sont fortement accélérés ces dernières années tant par une démarche collective au sein de la filière que dans des démarches individuelles au sein des entreprises du secteur.

Lutte contre le 2,4,6-TCA : la démarche globale de la Filière

Lorsqu’on examine la complexité de la chaîne d’élaboration des bouchons allant de la forêt jusqu’à la livraison chez l’utilisateur, on constate que chacune des étapes est susceptible d’influer sur la qualité du produit fini.

Systecode

A la suite des travaux de recherches réalisés dans le cadre du programme européen Quercus, la Confédération Européenne du Liège (CE Liège) a établi le Code International des Pratiques Bouchonnières (Guide de Bonnes Pratiques de Fabrication).

Ce code prend en compte les activités, couvrant de la levée des plaques de lièges, du stockage, de la préparation, de la fabrication à la finition des différents types de bouchons de liège.

Il préconise certaines pratiques et en interdit d’autres (comme par exemple le lavage au chlore, un de ses principaux objectifs étant de minimiser les risques d’apparition de goût de bouchon sur les produits finis.

La mise en application de ce code est un véritable moteur d’évolution de la filière Liège. Ce guide de bonnes pratiques est devenu le référentiel du travail quotidien des entreprises du secteur.

Chaque année, des entreprises de plus en plus nombreuses, demandent à être auditées par un organisme tiers indépendant (Bureau Veritas), dans le cadre de la procédure Systecode, pour obtenir un certificat attestant de la conformité de leurs pratiques de travail avec le Code International des Pratiques Bouchonnières.

Contrôle Qualité

Les contrôles qualité, pour appréhender la présence de TCA aux différentes étapes de process se sont intensifiés dans les entreprises. Ces contrôles reposent sur des méthodes d’analyses sensorielles doublées de plus en plus souvent par des méthodes d’analyses chimiques par chromatographie gazeuse. Les méthodologies suivies se sont uniformisées et ont fait l’objet de normes nationales et européennes (ISO).

Les entreprises réalisent en interne ou font réaliser par des laboratoires extérieurs les analyses par chromatographie pour mesurer les teneurs en TCA relargables des bouchons de liège.

En effet si des méthodes de dosage permettent de déterminer la teneur totale en 2,4,6 –trichloroanisole, c’est la fraction susceptible de migrer du bouchon dans le vin, c’est à dire l’extractible ou relargable qu’il importe de considérer en terme de prédiction du risque.

Cette migration sera fonction de la localisation du TCA dans le bouchon, de la porosité du bouchon, de la qualité de son traitement de surface, de la qualité de sa mise en œuvre et de son stockage. Cette approche permet de simuler ce qui est susceptible de se passer en bouteille.

Un grand nombre d’analyses est réalisé tout au long du process de fabrication pour évaluer les lots et vérifier que les spécifications fixées sont respectées.

Lutte contre le 2,4,6-TCA : Les différentes approches des entreprises de la Filière Liège

Dans la continuité des démarches collectives, les entreprises, dans leurs efforts pour supprimer les facteurs de risques les uns après les autres en s’appuyant sur l’évolution de la connaissance et sur une meilleure compréhension des phénomènes n’ont pas toutes eu les mêmes approches.

Les démarches préventives mises en place sont la plupart du temps complétées par des actions correctives.

Il est intéressant de noter qu’un certain nombre de brevets, portant sur les différentes approches suivies, a été déposé au niveau mondial.

Voici les principaux systèmes développés pour lutter contre le TCA.

Systèmes de bouillage :

Certaines entreprises ont travaillé tout particulièrement l’étape de bouillage de façon à optimiser l’extraction des composés hydrosolubles en utilisant une eau propre qui a un meilleur pouvoir extracteur et ne risque pas, par transcontamination, de contaminer des plaques saines.

Cela les a conduites à remplacer les installations existantes par de nouvelles unités dans lesquelles l’eau de bouillage est renouvelée en permanence et retraitée pour piéger les composés volatils extraits (dont le TCA). Cette approche tend à se généraliser dans l’ensemble de la filière.

La circulation de l’eau et la maîtrise des températures sont nettement améliorées grâce à un faible rapport liège/eau. Ces nouvelles installations permettent de raccourcir les temps de stabilisation après bouillage diminuant ainsi les risques de croissance de microorganismes. Les taux d’efficacité d’extraction sur le TCA sont de l’ordre de 60% sur plaques.

Autoclaves et utilisation de vapeur:

D’autres entreprises utilisent des autoclaves en complément du bouillage pour améliorer ces rendements d’extraction et gagner encore environ 10 à 15 % d’efficacité.

Certains systèmes travaillant en distillation de vapeur, en continu ou en batch, avec ou sans ajout d’alcool, arrivent à des diminutions de contamination allant jusqu’à 85% aussi bien sur granulés de liège que sur rondelles et bouchons. Ces systèmes impliquent des traitements administrés dans des unités spécifiquement affectées.

Systèmes d’extraction :

Certaines entreprises ont transposé des procédés de nettoyage ou d’extraction venant d’autres industries combinant par exemple l’action des ultrasons et l’utilisation d’un solvant organique. Des procédés particuliers permettent d’obtenir une efficacité d’extraction maximale proche de l’éradication (TCA relargable résiduel inférieur à la limite de quantification des méthodes analytiques). Il s’agit d’extractions par CO2 à l’état supercritique. Le solvant dioxyde de carbone a alors des caractéristiques spécifiques qui lui confèrent le pouvoir d’extraction d’un liquide et le pouvoir de diffusion d’un gaz lui permettant d’extraire les molécules organiques cibles situées en surface et à l’intérieur du matériau liège. Les paramètres de pilotage des procédés industriels ont été choisis pour effectuer une extraction sélective et pour ne pas modifier les caractéristiques intrinsèques du liège. De plus ces traitements ont une action drastique sur les microorganismes minimisant ainsi les risques de recontamination ultérieure.

Approche Actions sur les microorganismes / désinfection :

Pour améliorer la maitrise des microorganismes et ainsi minimiser le risque de transformation de chlorophenols en chloroanisoles par biométhylation, des compagnies ont axé leurs travaux sur la désinfection des bouchons.

Cette désinfection peut être réalisée par utilisation de rayonnement gamma, de microondes ou d’ozone en milieu liquide ou gazeux.

Une autre approche consiste à favoriser la croissance de souches exogènes sélectionnées pour leur incapacité à synthétiser du TCA (ou d’autres molécules organoleptiquement indésirables).

Procédé de lavage spécial :

Pour retirer aux microorganismes le substrat qui sera transformé par biométhylation, certaines sociétés ont choisi d’utiliser une enzyme oxydant les polyphenols naturels du liège.

Approche barrière fonctionnelle :

Cette approche consiste en l’utilisation de membranes (en silicone ou en matériau multicouches) pour éviter le contact entre le liège et le vin. Le rôle de ces membranes, en améliorant l’étanchéité, est de ralentir ou d’empêcher la migration du TCA et de participer à la régulation du transfert gazeux au travers du bouchon en liège.

Approche analyse individuelle des bouchons :

Cette approche s'effectue principalement en phase de finition. Elle vient en complément des autres techniques préventives et curatives mises en oeuvre tout au long de la chaine d'élaboration produit et ne les remplace pas. Elle consiste en un tri de sélection bouchon par bouchon effectué par analyse par chromatographie ou par spectrométrie. Cette technique non destructive et qui ne nuit ni à l'intégrité ni à la fonctionnalité du bouchon analysé va permettre d'écarter chacun des bouchons ne correspondant pas à une spécification donnée en terme de TCA. Cette spécification sera variable en fonction des techniques analytiques employées, de la sophistication des matériels de transfert, des vitesses d'analyses et des demandes des clients. Ces technologies de dépistage du TCA ont nécessité des années d'investissements tant financiers que techniques. Elles permettent d'arriver à des engagements produits individuels pour des bouchons de différents types.

Les différents procédés mis en œuvre sont, pour la plupart, validés en situation réelle par des organismes de recherche nationaux et internationaux. Ces travaux de validation ont été menés dans des pays différents, sur des vins différents, sur des durées de bouchage longues.

Conclusion :

Des faits et des données précises étayent les discours des acteurs de la filière liège, laissant de côté les effets d’annonce et se concentrant sur des solutions réellement efficaces pour répondre aux attentes des marchés du bouchage. Les résultats d’années de recherche sont maintenant tangibles et portent leurs fruits. La démarche de progrès engagée est en bonne voie. Les différentes mesures prises par les intervenants de la filière liège tant au niveau collectif qu’individuel sont encourageantes et laissent penser que la fin du goût de bouchon est toute proche.

Les utilisateurs pourront ainsi continuer à profiter en toute sérénité des propriétés physiques et mécaniques uniques de ce matériau qui contribue directement au plaisir de la dégustation.